Intention 3
Déterminer des changements et des continuités aux plans démographique, culturel et économique.
1760 - 1791
Déterminer des changements et des continuités aux plans démographique, culturel et économique.
Malgré l’arrivée de milliers de Loyalistes en provenance des États-Unis, les Canadiens conservent leur importance démographique dans la Province de Québec (Province of Quebec). En effet, les Canadiens forment la majorité de la population coloniale qui passe de 70 000 à 161 000 habitants entre 1760 et 1790. Cette croissance démographique relève surtout d’un fort taux de natalité chez les Canadiens, mais aussi de la faible densité de leur occupation du territoire qui ralentit la propagation des épidémies.
Alors que les Canadiens demeurent majoritaires au plan démographique à la fin du 18e siècle, une minorité anglophone et protestante continue d’accroitre son influence sur la politique et l’économie. Les seigneurs canadiens issus de la noblesse possèdent de moins en moins de terres, souvent au profit des marchands britanniques qui n’hésitent pas à acquérir des seigneuries en plus des cantons qu’ils reçoivent.
Même si l’immigration française cesse avec la Conquête, la forte natalité assure la croissance démographique des Canadiens, ce qui pérennise l’usage de langue française et la pratique de la religion catholique. L’Église catholique continue d’offrir un encadrement spirituel et culturel aux Canadiens dans la Province de Québec, mais elle affronte toutefois plusieurs obstacles dans la foulée du changement d’empire. Dès 1763, les instructions demandent au gouverneur James Murray d’enquêter sur les communautés religieuses catholiques et de favoriser l’implantation de l’Église anglicane.
Après l’Acte de Québec de 1774, la couronne britannique restreint davantage les droits des communautés masculines comme les Récollets et les Jésuites en les empêchant de recruter de nouveaux religieux et en confisquant leur propriété une fois la communauté éteinte. En quelques décennies, ces deux communautés disparaissent de la Province de Québec et ne reviendront qu’à partir de la moitié du 19e siècle. Malgré le déclin de ces communautés religieuses, l’Église catholique peut continuer de nommer des prêtres pour constituer son clergé et peut de nouveau percevoir la dime pour financer ses activités, ce qui permet aux Canadiens de continuer à pratiquer la religion catholique dans les paroisses.
De leur côté, les communautés religieuses féminines comme les Augustines et les Ursulines ne sont pas affectées par les restrictions de recrutement. Beaucoup d’entre elles poursuivent donc leurs activités dans la colonie, que ce soit dans les hôpitaux ou les écoles. À la fin du 18e siècle, la Province de Québec compte 40 écoles catholiques pour les 160 000 habitants catholiques alors que les 10 000 habitants protestants bénéficient de 17 écoles protestantes.
En parallèle, le changement d’empire amène l'implantation de l’Église anglicane dans la colonie, une branche du protestantisme fondée au 16e siècle en Grande-Bretagne. Cela dit, les protestants d’origine britannique ou américaine demeurent minoritaires dans la colonie et l’Église anglicane parvient difficilement à convertir les Canadiens. Jusqu’à la fin du 18e siècle, les protestants de la Province de Québec occupent et utilisent des lieux de culte catholiques pour célébrer des rites comme les mariages et les baptêmes. Certaines églises catholiques deviennent même des églises anglicanes avec le déclin des Récollets et des Jésuites.
Après la Conquête, la couronne britannique maintient une politique économique fondée sur le mercantilisme, ce qui implique d’exploiter les ressources naturelles de la colonie pour enrichir la métropole. Bien que les Canadiens soient majoritaires aux plans démographique et culturel, la minorité anglophone et protestante accentue rapidement son influence sur l’économie de la colonie grâce aux capitaux de la métropole.
Dès la fin des années 1760, les marchands britanniques financent plus de la moitié des voyages de traite, ce qui leur permet d’accroitre leur emprise sur le commerce des fourrures. Pour consolider cette emprise, des marchands écossais créent la Compagnie du Nord-Ouest en 1783, ce qui leur permet de faire face à la Compagnie de la Baie d’Hudson qui domine la traite de fourrures depuis plus d’un siècle. Malgré l’influence économique des marchands britanniques, les Premières Nations et les voyageurs canadiens continuent de jouer un rôle incontournable dans la production et le transport des fourrures.
Jusqu’à la fin du 18e siècle, les fourrures représentent la majorité des exportations de la Province de Québec vers la Grande-Bretagne. La colonie exporte aussi de plus en plus de produits de l’agriculture comme le blé vers les marchés britanniques, mais la production agricole vise d’abord à assurer la subsistance de la population coloniale. Si les censitaires dégagent un léger surplus de leur production agricole, ils peuvent utiliser ce surplus pour payer les redevances aux seigneurs. Jusqu’à l’abolition du régime seigneurial en 1854, les rentes augmentent considérablement dans certaines seigneuries, ce qui entretient les inégalités socioéconomiques au sein de la population coloniale.