Intention
Décrire le régime de peuplement et d’exploitation du territoire sous le régime français et ses caractéristiques rurales et urbaines.
1608 - 1760
Décrire le régime de peuplement et d’exploitation du territoire sous le régime français et ses caractéristiques rurales et urbaines.
Entre 1608 et 1760, la France compte sur le régime seigneurial pour organiser la distribution des terres aux colons qui s’installent en Nouvelle-France. Ce mode d’occupation du territoire qui provient de la métropole permet également de reproduire les divisions sociales européennes dans la colonie.
Entre 1608 et 1760, la couronne française considère qu’elle est propriétaire du territoire qu’elle revendique en Amérique du Nord, et ce, malgré la présence des Autochtones qui occupent ce territoire depuis plusieurs millénaires. Pour peupler et exploiter les terres, les autorités coloniales subdivisent le territoire en vastes domaines. Elles attribuent ces domaines, appelés des seigneuries, aux membres de l’élite coloniale qui deviennent donc des seigneurs. À leur tour, les seigneurs doivent diviser leur seigneurie en censives qui seront occupées, défrichées et cultivées par des censitaires.
La métropole instaure le régime seigneurial en Nouvelle-France dans les années 1620 en concédant les premières seigneuries, dont celle octroyée à Louis Hébert. Ce seigneur, son épouse Marie Rollet et leurs enfants représentent d’ailleurs la première famille française de la colonie, arrivée en 1617. À partir de 1627, c’est la Compagnie des Cent-Associés qui prend le relais des autorités coloniales et qui commence à concéder des seigneuries dans les villes et les campagnes de la vallée du Saint-Laurent.
En attribuant des seigneuries, la couronne française cherche à favoriser l’installation de colons et l’agrandissement de l’espace cultivable. Jusqu’à la fin du régime français en 1760, les autorités coloniales concèdent environ 250 seigneuries dans la vallée du Saint-Laurent. Le fleuve et ses affluents permettent de faciliter l’accès à l’eau et d’irriguer les sols pour l’agriculture, ce qui explique pourquoi les censives sont généralement perpendiculaires à ces cours d’eau.
En plus d’être un mode organisation du territoire, le régime seigneurial est un système hiérarchique qui structure les rapports sociaux en France depuis le Moyen Âge. Ce système détermine ainsi les rapports entre les seigneurs et les censitaires en Nouvelle-France. Leurs rapports prennent forment à travers les devoirs et les droits de chacun, qui traduisent des relations inégalitaires et souvent conflictuelles entre les différents groupes sociaux soumis à l’absolutisme de droit divin.
Conformément au principe de la féodalité hérité Moyen Âge, les seigneurs doivent fidélité au roi. Les seigneurs sont généralement des membres de la noblesse ou du clergé, étant donné que ces classes sociales appartiennent à l’élite de la société française.
En Nouvelle-France, les seigneurs issus du clergé vivent généralement sur leur seigneurie, comme en témoigne la contribution des Sulpiciens au développement de l’ile de Montréal. En ce qui concerne les seigneurs laïcs, seulement 25 % d’entre eux résident sur leur seigneurie. En effet, la plupart de ces seigneurs décident de s’établir dans les villes où ils font notamment carrière dans l’armée, car les revenus en provenance de leur seigneurie ne permettent pas toujours de répondre à leurs besoins. Bien que les seigneurs considèrent souvent ces revenus comme insuffisants, cela ne les empêchent pas d’exercer une pression financière sur les censitaires. Ceux-ci connaissent des conditions de vie difficiles entre autres à cause de leurs dettes envers les seigneurs.
L’organisation sociale de la Nouvelle-France reproduit celle de la France, mais la vie des censitaires canadiens est tout de même différente de la vie des paysans français. Alors que les campagnes d’Europe sont pleinement occupées, ce qui laisse de plus en plus de paysans sans terres, la paysannerie canadienne dispose de son côté de nombreuses terres à défricher. Cette abondance de terres dans la vallée du Saint-Laurent permet ainsi d’éviter un appauvrissement d’une partie de la paysannerie au fil de l’accroissement de la population. Même si les paysans de la colonie sont affectés par la maladie, la famine et la surmortalité, ils le sont dans une moins grande mesure que les paysans de la métropole qui sont plus exposés aux épidémies et à la dévastation de la guerre.