Intention
Déterminer des causes et des conséquences des conflits entre des nations autochtones ou entre des Premières Nations et la Nouvelle-France.
1608 - 1760
Déterminer des causes et des conséquences des conflits entre des nations autochtones ou entre des Premières Nations et la Nouvelle-France.
Avant l’arrivée des Européens en Amérique, les Premières Nations forment des alliances et participent à des guerres pour honorer leurs morts, faire des prisonniers ou défendre leur territoire. En plus de représenter un avantage sur le plan militaire, les alliances permettent aux nations autochtones de former des réseaux économiques et culturels qui assurent leur prospérité. Au moment où les Français s'établissent dans la vallée du Saint-Laurent, des rivalités existent depuis plusieurs décennies entre les Hurons-Wendats et les Iroquois.
Avec l’alliance franco-amérindienne de 1603 et l’établissement de Québec en 1608, les autorités coloniales françaises comprennent qu’il est dans leur intérêt d’entretenir des rapports diplomatiques avec certaines nations autochtones. Afin de sécuriser le commerce des fourrures et d’étendre le territoire de la colonie, les Français maintiennent leurs relations avec les Innus et les Anishinabegs (Algonquins), puis ils forgent de nouvelles alliances avec les Hurons-Wendats de la région des Grands Lacs.
En s’intégrant au réseau d'alliances de certaines nations autochtones, les Français prennent part aux conflits qui opposent ces nations à d’autres peuples autochtones. Par exemple, Samuel de Champlain et ses troupes se battent contre les Iroquois à trois reprises aux côtés des Innus, des Anishinabegs et des Hurons-Wendats.
Les Français s’engagent aussi dans les conflits des Premières Nations en se donnant le rôle de médiateur entre les peuples autochtones rivaux. Les gouverneurs de la Nouvelle-France tentent d'utiliser cette position d’intermédiaire pour accroitre l’influence diplomatique des Français en Amérique et pour s’assurer que la résolution des conflits convient aux intérêts de la métropole.
Les Premières Nations qui s'allient aux Français cherchent principalement à renforcer les relations économiques qui leur permettent d’accéder aux produits européens. Les alliances peuvent aussi avantager ces nations sur le plan militaire, car celles-ci peuvent obtenir plus facilement des armes à feu et même du soutien de la part des soldats français. Ce sont des objectifs similaires qui incitent les Iroquois à conclure des alliances avec les Britanniques qui s'établissent sur la côte est de l’Amérique du Nord au 17e siècle.
Malgré la politique d’alliance et de médiation des Français, l’expansion de la Nouvelle-France demeure tributaire de la diplomatie autochtone. En effet, les rivalités entre les Hurons-Wendats et les Iroquois se poursuivent après l’arrivée des Français et elles influencent le développement de la colonie. Ces guerres iroquoises vont même s’intensifier en raison du commerce des fourrures, car les Iroquois perçoivent les alliances entre les Français et les Hurons-Wendats comme une menace à leur propre réseau commercial. En effet, les Iroquois veulent préserver leurs relations économiques avec les Hollandais et les Britanniques afin de maintenir leur source d’approvisionnement en produits européens.
Les guerres iroquoises entrainent des conséquences sur les populations autochtones, comme en témoigne la série d’attaques menées par les Iroquois qui détruisent la Huronie entre 1648 et 1650. Menacés par les épidémies et les guerres, les Hurons-Wendats abandonnent leurs villages et se dispersent au sein des groupes pétuns et iroquois ou près des villes françaises. La dispersion des Hurons-Wendats permet aux Iroquois de faire obstacle à l’influence politique des Français dans la région des Grands Lacs. Dans la deuxième moitié du 17e siècle, les tensions s’accentuent entre les Iroquois et les Français qui ne peuvent plus compter sur leurs alliés de la Huronie. De nombreux villages, qu’ils soient iroquois ou français, vivent dans une crainte constante d’attaques qui visent la destruction des habitations et des récoltes.
Après la dislocation de la Huronie, les Iroquois multiplient leurs expéditions guerrières dans la vallée du Saint-Laurent, ce qui nuit au commerce des fourrures, à la sécurité des colons et au recrutement des engagés en France. Afin de renforcer la position militaire de la Nouvelle-France, la couronne française y envoie plus de 1 100 soldats du régiment Carignan-Salières en 1665. Ce régiment amorce la construction de plusieurs forts dans la colonie et il lance des offensives en territoire autochtone, où les soldats français incendient des villages iroquois. Néanmoins, le régiment Carignan-Salières ne réussit pas à mettre fin aux pressions militaires qu’exercent les Iroquois sur la colonie, comme en témoigne leur attaque contre les colons français de Lachine en 1689.
Malgré plusieurs tentatives de paix, les guerres iroquoises reprennent constamment jusqu’à la fin du 17e siècle. Les Iroquois subissent toutefois un revers important après le traité de Ryswick de 1697, car ils reçoivent moins d’armes à feu de leurs alliés britanniques qui doivent faire preuve de neutralité en vertu de ce traité. Dans ce contexte, certains Iroquois qui veulent résoudre le conflit de façon diplomatique deviennent de plus en plus influents au sein de leur confédération. Du côté des Français, la possibilité d’une paix dans la région des Grands Lacs représente une occasion de stabiliser le commerce des fourrures et de sécuriser l'exploration du territoire.
Dès 1697, les Iroquois ainsi que les Français et leurs alliés autochtones veulent mettre fin une fois pour toutes au conflit, mais leurs intérêts respectifs sont difficilement conciliables. Durant quatre ans, ces groupes rivaux doivent donc négocier ensemble afin d’établir les bases d’une paix durable. Plusieurs négociations se déroulent à l’initiative du chef huron-pétun Kondiaronk, qui parcourt un vaste territoire pour rallier les Premières Nations au projet de paix.
En 1701, plus d’un millier de délégués autochtones se rendent à Montréal afin d’achever les négociations et de sceller la paix. Durant deux semaines, les Français et les Premières Nations finalisent leurs négociations dans un contexte de tensions diplomatiques. Ces tensions découlent en partie d’une épidémie qui décime certaines délégations autochtones. Malgré les tensions, le chef huron-pétun Kondiaronk compte sur ses talents d’orateur pour prononcer un discours qui réussit à convaincre l’ensemble des délégations de conclure une paix. Atteint par la maladie, Kondiaronk meurt avant la signature finale de la paix dont il est l’un des principaux artisans.
Le 4 août 1701, la Grande Paix de Montréal est signée par les Français et près de quarante nations autochtones, incluant les Anishinabegs, les Innus, les Abénakis et les Iroquois. Cette alliance marque le début d’une paix relative entre les Premières Nations de la région des Grands Lacs tout en s'inscrivant en continuité avec la politique de médiation des Français dans le nord-est de l’Amérique.